L’étoile Zizi Jeanmaire s’est éteinte à Tolochenaz

Publié le par Pierre-Sauveur.B

La ballerine et chanteuse est décédée vendredi à l’âge de 96 ans à son domicile suisse 

C’est sur la scène du théâtre de Vevey, le 24 novembre dernier, que Zizi Jeanmaire a fait sa dernière apparition publique. Elle est décédée subitement ce vendredi, à l’âge de 96 ans. Cette immense figure du ballet et du music-hall a gardé jusqu’à la fin son esprit vif, son humour et même sa voix.

À Vevey, au terme du gala réunissant des extraits de ballets de Roland Petit, son mari décédé il y a neuf ans, elle avait répondu par une chanson à la longue standing ovation! Et à sa biographe parisienne Ariane Dollfus qu’elle avait au téléphone il y a dix jours, elle avait dit: «Alors, Ariane, est-ce que vous avez Skype? Parce que ce serait plus amusant de se parler en se voyant.»

En dépit des années, en dépit des problèmes de santé, Zizi Jeanmaire était restée une grande dame, éveillée et élégante. Le décès inattendu de Roland Petit, à Genève où le couple vivait alors, l’avait laissée désemparée. Et en procès pour «gestion déloyale aggravée» avec son ancien gérant de fortune. Mais avec le soutien indéfectible de Barbara, son ange gardien depuis 2012, elle avait remonté la pente et s’était établie à Tolochenaz. Lors d’un entretien qu’elle nous avait accordé l’an dernier, elle nous était apparue très sereine, bien que dans l’attente du moment où elle irait rejoindre celui qu’elle appelait toujours «mon époux».

«J’ai vécu des choses merveilleuses. Je me dis que j’ai eu beaucoup de chance. Mais j’ai mis en pratique ce précepte que me répétait ma mère: Aide-toi et le ciel t’aidera.» Quelle carrière, effectivement, sans équivalent en Europe! L’École de danse de l’Opéra de Paris dès 1933, où elle a Roland Petit pour camarade. Puis, le Ballet de l’Opéra, les Nouveaux Ballets de Monte-Carlo, auprès de Serge Lifar; les Ballets de Paris, dès 1948; la rupture avec Roland, en 1953, leur mariage l’année suivante, et la naissance de leur fille Valentine en 1955!

 

Couple à la scène comme à la ville, Zizi et Roland resteront unis à travers succès, difficultés, échecs et triomphes. C’est pour elle qu’il règle des chefs-d’œuvre tels que «Carmen». C’est pour lui qu’elle commence à chanter dans «La Croqueuse de diamants». Ensemble, ils travaillent à l’Alhambra et au Casino de Paris, à Broadway et à Hollywood.

Car la belle ballerine aux jambes interminables a tous les dons. Elle danse avec Noureev et avec Barychnikov. Sur l’écran comme sur la scène, elle donne la réplique à Danny Kaye, Bing Crosby, Pierre Mondy et Daniel Gélin. Elle a pour amis proches Boris Vian, Yves Saint Laurent, Serge Gainsbourg, Michel Legrand, Michel Tournier, Edmonde Charles-Roux…

Son tempérament de battante vient à bout d’une rupture du tendon d’Achille à la veille de la «Symphonie fantastique» à l’Opéra de Paris et d’une hépatite avant la première de «Can-Can», la comédie musicale de Cole Porter, à New York. Grand Prix du disque, en 1950 déjà, elle ne se contente pas d’être une formidable meneuse de revue («Zizi je t’aime», «Hollywood Paradise»…), enluminant des numéros inoubliables («Mon truc en plumes», «Cheek to Cheek»…).

Elle est une remarquable interprète de textes poétiques. Aragon lui offre ainsi son poème «Nous dormirons ensemble», que Jean Ferrat met en musique. Aragon qui écrit aussi: «Sans elle, Paris ne serait pas Paris.» C’est à Paris qu’une cérémonie sera organisée à sa mémoire en septembre.

 

L’étoile Zizi Jeanmaire s’est éteinte à Tolochenaz

Publié dans La tête à l'envers

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